Après trois week-ends intenses de musique de chambre, le festival de Pâques a quitté, samedi soir, sa salle fétiche Elie de Brignac. Harmonieusement rénovée depuis deux ans, elle n’a rien perdu de ses qualités acoustiques, qui avaient plu à Yves Petit de Voize. En jetant son dévolu sur cette enceinte destinée aux ventes de chevaux, le manitou en chef du festival avait pu surprendre. Mais ce sont tout autant des cracks qu’il y fait découvrir, au travers d’un choix d’œuvres aussi étonnant que pertinent.
Cette 18e édition a été d’entrée marqué par l’empreinte des « anciens », le pianiste Jérôme Ducros et le violoncelliste Jérôme Pernoo , deux de la bande des quatre, fondatrice du festival. Ils ont insufflé à leurs jeunes collègues de l’Atelier de musique une dynamique inspirée dans « La Danse des morts », quadruple concerto d’Olivier Greif, créé en 1998, deux ans avant la mort du compositeur. Ce fut un véritable choc que cette œuvre profonde et forte, justement saluée par une ovation. Yves Petit de Voize en avait fait la commande pour le festival de Cordes-sur-Ciel (Tarn). Olivier Greif la lui avait dédiée. Jérôme Ducros avait participé à sa première audition. On souhaite un enregistrement de cette œuvre saisissante encore méconnue.
Amaury Coeytaux , violoniste, et l’altiste, Lise Berthaud, chefs de file dans la Symphonie concertante K. 364 de Mozart, ont fait preuve du même effet d’entraînement dans une complicité heureuse. Complicité est le maître-mot du rendez-vous deauvillais. Elle est bien établie dans le trio Les Esprits. Mi-Sa Yang, Adam Laloum, Victor Julien-Laferrière, violon, piano et violoncelle, doivent leur rencontre pour avoir été repérés par Yves Petit de Voize. Elle s’immisce comme un charme, quand la délicieuse Lise, vient avec le contrebassiste Yann Dubost, compléter la formation pour une lecture fraîche de la (trop) célèbre Truite de Schubert.
Complicité encore avec les pianistes Guillaume Bellom et Ismaël Margain, unis comme pouvaient l’être Jonas Vitaud et Bertrand Chamayou, que remplace désormais Guillaume Vincent. De cette soirée à deux pianos, on retient cette œuvre insolite de Robert Schumann ajoutant un cor et deux violoncelles, cette Sonate trop boudée de Francis Poulenc, enfin un Brahms, associé à un Ravel, dont la Rhapsodie espagnole a bien dû titiller les oreilles d’un Leonard Bernstien.
Complicité toujours quand on retrouve Ismaël Margain, le violoniste Pierre Fouchenneret, lui aussi très présent à ce 18e festival, associés à l’altiste Adrien Boisseau et au violoncelliste Yan Levionnois pour une lecture très convaincante du 3e quatuor à cordes de Mendelssohn. Cette pièce a fait l’objet d’un enregistrement en prise directe. Le festival va produire son propre label. Son premier opus est consacré à Mendelssohn.
On pourra entendre l’intégralité de cette soirée le 23 mai prochain sur France Musique. C’est l’occasion de découvrir le magnifique final qu’a constitué le2e quatuor pour piano et cordes de Johannes Brahms. Le pianiste Nicolas Angelich _ membre de l’équipe de musiciens fondatrice du festival, il ne manquait que Renaud Capuçon cette année _ Amaury Coeytaux, Antoine Tamestit, à l’alto, et Yan Levionnois, ont donné toute la mesure de leurs talents. C’était grand !
Le 4 mai 2014.
Laisser un commentaire