« Correspondances » en prépa Bach

En prélude à une tournée européenne, Sébastien Daucé et son ensemble « Correspondances » a présenté un programme consacré à deux compositeurs allemands, Dietrich Buxtehude (1637-1707) et Heinrich Schütz (1585-1672). Leurs cantates sur le thème de la Passion du Christ annoncent Bach. Leurs œuvres révèlent une force spirituelle soutenue par une expressivité musicale et la qualité des récitatifs. Construites autour du chiffre 7, synonyme d’achèvement dans la symbolique biblique, elles sont significatives du répertoire luthérien. Le cadre de Notre-Dame de la Gloriette, à Caen, convenait parfaitement à ce concert à l’exécution inspirée.

Cinq ans avant la naissance de Jean-Sébastien Bach, Dietrich Buxtehude compose durant l’année 1680 un cycle de sept cantates, « Membra Jesu nostri » (Membres du Christ), destiné à la Semaine Sainte, qui précède la fête de Pâques. Le musicien est alors l’organiste de l’église Sainte-Marie (Marienkirche) de Lübeck, au nord de l’Allemagne. Sa notoriété dépasse la ville des bords de la Baltique.

Il est en particulier repéré par Gustav Düben, maître de chapelle du roi de Suède, auquel il envoie nombre de cantates. Parmi le fonds Düben, conservé à l’université d’Uppsala, au nord de Stockholm, figure celles rassemblées sous le titre « Membra Jesu nostri ».

Sébastien Daucé parle d’un chef d’œuvre qu’il a à cœur de réhabiliter.  Il adjoint à cette redécouverte une autre œuvre vocale, « Da Jesus an dem Kreuze stund » (Les Sept Paroles du Christ en croix) de Heinrich Schütz, aîné de Buxtehude. Avec eux, c’est tout un courant de musique sacrée qui s’épanouit à l’amorce du XVIIIe siècle d’outre-Rhin et dont le génie de Jean-Sébastien Bach donnera la pleine mesure.

Schütz a vécu l’horrible guerre de Trente Ans, qui a déchiré l’Europe jusqu ‘à la moitié du XVI e siècle entre princes catholiques et protestants. Cette même période a cependant activé un renouveau musical, et aussi une soif de spiritualité devant la fragilité humaine. La religion luthérienne qui s’étend de l’Allemagne du Nord aux pays scandinaves concentre ces courants dans une forme d’austérité rituelle, que reflète la musique de Schütz.

On mesure d’un compositeur à l’autre l’évolution d’un style, qui d’empreint de tradition médiévale glisse vers une modulation plus expressive. En dépit d’une certaine sévérité, cette musique touche au cœur, non pas tant par des affects que par une invite apaisée à la réflexion mystique.

On retrouve autour de Sébastien Daucé une équipe d’artistes fidèles, dont les sopranos Caroline Weynants, Caroline Bardot, Perrine Devillers ; le baryton-basse Etienne Bazola ; la violoniste Josèphe Cottet, Mathilde Vialle, Etienne Floutier, Julie Dessaint, violes de gambe ; Carolile Lieby, à la harpe. Celles et ceux-là mêmes qui ont participé à l’enregistrement de ce programme, en 2021, chez Harmonia Mundi.

Lucile Richardot, fidèle par les fidèles, n’était pas là. On a pu découvrir à place une autre alto, Mathilde Ortscheidt, qui a été retenue pour le prestigieux concours Reine Elisabeth, en mai prochain à Bruxelles. A suivre, donc. Toutes et tous, sous la direction toujours attentive et bienveillante de Sébastien Daucé, témoignent d’une interprétation solidaire et finement personnelle. Le résultat est saisissant et offre comme une parenthèse hors temps tout au bonheur musical méditatif.

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Concert donné à Notre Dame de la Gloriette, le dimanche 12 mars 2023.

 

 

 

 

 

 

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